 Actus
-- AOUT 2001 -- N° 654
Botanique
Des mères porteuses pour les cyprès
Le cyprès du Tassili se reproduit par une sorte de
clonage naturel. Cette particularité le protège
de la consanguinité.
De l'espèce de cyprès du Tassili des Ajjer
(Cupressus dupreziana), il ne reste que 231 individus, survivant
tant bien que mal, malgré la protection dont ils
font aujourd'hui l'objet, sur les terres arides de ce désert
du sud-est algérien. Une équipe franco-italienne
dirigée par Christian Pichot, de l'Unité de
recherches forestières méditerranéennes
de l'Inra d'Avignon, a découvert chez cet arbre une
stratégie de reproduction inhabituelle, et pour ainsi
dire inédite. Il est capable de produire un embryon
diploïde par apomixie, c'est-à-dire sans fécondation.
Chez Cupressus dupreziana, l'embryon n'est pas le résultat
de la fusion d'un gamète mâle et d'un femelle,
comme c'est le cas dans une reproduction sexuée,
mais il y a doublement des chromosomes d'un seul gamète.
Jusqu'à présent, ce clonage naturel n'avait
été remarqué que chez les plantes à
fleurs (angiospermes), jamais chez les gymnospermes, auxquelles
appartient le conifère. Chez l'animal, un système
analogue existe. C'est la parthénogenèse.
Mais, là où ce cyprès fait encore plus
fort, c'est que ce n'est pas à partir des gènes
de la mère que se développe l'embryon. L'apomixie,
cas unique, est ici paternelle.
Pour arriver à cette conclusion, les chercheurs ont
fait des croisements interespèces en déposant
du pollen du cyprès du Tassili sur le cône
femelle de son cousin provençal, le " toujours
vert " Cupressus sempervirens. Pas de doute : les "
hybrides " n'en sont pas vraiment. Ils sont génétiquement
et morphologiquement identiques au seul père algérien.
Le cyprès de Provence jouant le rôle de mère
porteuse.
Ce mode de reproduction évite à Cupressus
dupreziana de recourir à des fécondations
consanguines, inévitables dans une population aussi
réduite que la sienne. Il échappe ainsi aux
tares génétiques liées à la
consanguinité. Il reste aux chercheurs à étudier
le bagage génétique de chacun des 231 individus
restants pour vérifier s'ils sont bien exempts de
gamètes femelles.
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