Qu'as
tu fait de ta liberté? Ne sais tu pas que
la maison est le tombeau des vivants? (Proverbe Touareg)
Il y a 30 ans encore, on pensait que les
grandes innovations technologiques (poterie,
élevage, métallurgie) étaient
toutes nées au Proche-Orient et avaient
atteint l'Afrique subsaharienne par la vallée
du Nil. La recherche archéologique
a montré que ce n'était plus
tout à fait vrai.
La découverte dans le massif de l'Air
(site de Tagalagal dans les monts Bagzanes)
d'un gisement archéologique daté
au carbone 14 de 11 000 à 10 000 BP
et contenant de nombreux tessons de céramique,
des meules ainsi que des outils de pierre
de toute nature prouve que la fabrication
de la poterie utilitaire dans les massifs
sahariens a précédé de
plus de mille ans sa généralisation
au Moyen-Orient. Il faut maintenant prendre
en compte l'antériorité de l'élevage
des bovins, autre innovation capitale du Néolithique.
Le
temps est largement venue de renoncer à
l'idée d'une Afrique éternellement
"à la traîne" des inventions
asiatiques et européennes. (Marianne
Cornevin).
Un
berger armé d'une lance et d'un bâton
tente
d'éloigner l'animal sauvage qui vient
de tuer
une vache de son troupeau. Wadi Aramat
Vers
le VII millénaire BP, peut être même
avant, les sociétés vivant en Afrique,
Sahara et Afrique de l'est, font l'acquisition
de la domestication du boeuf, du mouton et de
la chèvre. Alors partout dans le Sahara
des populations de pasteurs, qui sont aussi des
artistes accomplis, se répandent. Tous
ces bovidiens partagent les mêmes grands
traits de civilisation, cependant, préfigurant
la mosaïque ethnique de l'Afrique, quelques
groupes se distinguent et se trouvent aux origines
de peuples actuels du Sahel.
Au
cours de l'humide néolithique l'humidité
va se localiser et transformer le Sahara en
une multitudes de climats régionaux,
alternant des zones verdoyantes et des espaces
plus sec. L'homme et l'animal vont partager
les mêmes territoires ce qui va favoriser
l'apprivoisement.
Une
des premières phase de la domestication
est peut être l'utilisation de bovins
comme "garde-manger ambulant" par
des groupes de chasseurs circulants entre
des points d'eau.
Il est maintenant acquis que
la domestication s'est faite à partir
d'une souche sauvage d'aurochs (Bos Primigenius).
La principale espèce clairement reconnaissable
dans les troupeaux est le Bos primegenius
domestique. On remarque aussi la race à
cornes longues, fines et en lyre, dénommée
Bos africanus mais qui n'est peut être
qu'une variété de la précédente.
Un
autre type est le boeuf à cornes courtes
et épaisses (Bos brachyceros)
bien que certains auteurs n'y voit qu'une
interprétation abusive des oeuvres.
Dans un même troupeau
les formes des cornes peuvent très variables
: des bêtes acères (sans cornes)
côtoient d'autres animaux avec des cornes
en avant ou en lyre. On est frappé
par la variété du cornages de
ces boeufs mais ,de nos jours, les Peuls du
Burkina n'ont pas moins de douze termes pour
désigner les formes des cornes de leurs
bêtes.
Dans
les peintures et gravures quelques boeufs
ont visiblement une sorte de bosse à
l'arrière de la tête, un vrai
zébu qui pourrait indiquer l'existence
d'un foyer africain de celui ci.
Les bovidés
sont traités en teinte plate avec souvent
une réserve centrale
La robe
bicolore est un indice de la domestication
Les
artistes on déjà un attrait
pour le pigment blanc. Le dessin de la robe
est complexe.
Les
parois se desquament fréquemment. Ici
la nouvelle surface a été réutilisée
plus tard par un autre artiste.
On
retrouve ces boeufs avec de grandes cornes
en forme de lyre le plus souvent croisés
avec des zébus originaires d'Asie dans
les plaines sahélienne entre les mains
de pasteurs, notamment des Peuls Bororo.
La
majorité des images montre des activités
pastorales et présente la vie quotidienne
des habitants qui ont vécu dans les massifs
du Sahara il y a plus de 5 000 ans.
Cependant il serait limitatif
de ne voir que le côté documentaire
et anecdotique de ces oeuvres. Il est évident
que l'acte de représenter ces scènes
témoigne du lien profond qui unit les
hommes à leurs troupeaux, comme dans
les sociétés pastorales d'aujourd'hui.
Un
des thème les plus fréquent est
la tribu en déplacement. Les boeufs transportent
les femmes et les enfants, les ballots et les
armatures de cases. Les archers sont devant,
l'arc à la main prêts à
défendre le groupe.
Fresque
de Jabbaren. Un des hommes tient un bâton appuyé
sur ses reins, une attitude familière
des bergers
Deux
bergers avec des arcs mènent leur troupeau.
(Sefar).
Sur la fresque ci dessus les hommes sont
presque tous représentés dans
une position agressive, en position de course
avec des arcs à la main. Les boeufs
semblent porter des structures courbes effilée
à l'avant et plus épaisses à
l'arrière qui pourraient être
des armatures de cases ou de
tentes. Un des archers est dans un galop effréné.
Des boeufs sont montés par des groupes
de 3 personnages. La largeur totale de tableau
est de plus de 2 m.
La
tradition du portage du matériel est
encore vivante de
nos jours chez les peuls. L'objet le plus
courant est le
piquet placé horizontalement entre
les cornes avec la
corde à veaux (que l'on distingue nettement
entourée
autour du piquet sur ce qui reste de cette
figure effacée
par l'érosion).
Les fresques soulignent souvent l'importance
donnée au matériel du pastorat
notamment avec la corde à veaux.
Chez les Peuls cette corde était tendue
à l'étape entre des piquets, on
y nouait plusieurs boucles, chacune servant
à attacher un veau afin de le tenir éloigner
de sa mère pendant la traite. Cette corde,
appelée dangul, représente la
"ligne de vie du troupeau" et les
piquets qui la soutiennent portent les mêmes
noms que les séquences qui divisent le
mois lunaire.
Les cordes à veaux, qui interviennent
lors de l'initiation des bergers, sont la propriété
des femmes, chargées de tout ce qui concerne
le laitage. Dans chaque parc était entreposée
une grande calebasse destinée à
recueillir le lait. Elle était placée
sous l'autorité et la gestion de la première
femme de la famille promue "gardienne du
lait".
Scènes
de la vie quotidienne au campement.
Femmes
bovidienne assises, portants de grands chapeaux
et bavardant. (Sefar).
Scène
pastorale. En bas à gauche peut être
une laie accompagnée d'un marcassin.
(Sefar).
Détails
d'une scène avec un mât et des
calebasses suspendues. Wadi
Aramat.
Le
petit bétail, chèvres et moutons,
est aussi présent dans l'art rupestre.
Au Sahara en général l'élevage
de ce petit bétail semble se répandre
réellement au V et VI millénaires.
C'est dans le désert occidental d'Egypte
que les dates de la domestication sont les
plus hautes. Des sites au Maghreb datés
du milieu du IX millénaire contenaient
des ossements d'ovicaprinés sauvages
à partir desquels la domestication
aurait pu se faire.
L'existence d'une souche sauvage d'ovicaprinés
reste donc une des grandes questions de la
Préhistoire.