Les Girafes de Dabos

La vie, c'est un jour que tu aimes, un que tu n'aimes pas jusqu'à celui où tu n'es plus.
(proverbe touareg).


Située au sud-ouest de l'Aîr les grandes plaines, où se déroulent chaque année la cure salée des pasteurs nomades Peuls et Touaregs, abritent des stations de gravures rupestres dont la plus célèbre est Dabos, connue pour ses girafes.

La station occupe un pointement rocheux au milieu d' une dépression naturelle et présente un ensemble de gravures où l' association bovins-girafes prédomine.

La scène la plus extraordinaire représente deux girafes gravures se présente sur une dalle inclinée avec des dimensions proches de la réalité, ce qui est exceptionnel. La plus grande mesure 5,40 mètres ce qui est approximativement la taille d' une girafe mâle adulte.

Ces girafes peuvent être incluses dans l' ensembles des gravures de l' école du bubalin naturaliste.

La même technique a été utilisée pour les deux animaux qui semblent se suivre. Les contours du corps sont gravés profondément en tracés larges.

 

La girafe est l' une des vedettes de ce grand musée en plein air. Elle semble avoir inspiré aussi bien les chasseurs que les bergers, durant les 12 millénaires précédent la désertification. La variété des styles et des techniques utilisés dans ces images dénotent la grande habilité ou la maladresse de leurs auteurs. Peut être évoquent-t-elles aussi la charge émotionnelle, voire magique et même mystique que cet animal portait dans l' imaginaire de ces populations impressionnées par sa taille et son élégance.

Les crinières sont dessinées à l' aide de courts traits parallèles. L' intérieur de la tête de la plus grande girafe est entièrement raclé.
Les ocelles dont le corps des girafes est parsemé sont matérialisées par la technique du bas-relief.

Une longue ligne sort de la bouche de chaque girafe. Le cou de la plus peite girafe est sous-tendu d' un lien qui aboutit à la coiffure d' un personnage schématique lui même à coté d' un bovidé.

 

 

 

A travers cette composition on peut trouver la volonté des graveurs de relier les bovins aux girafes par l' entremise de petits pasteurs.

On peut se poser la question d' une domestication effective de la girafe, les différents traits représentant alors des laisses ou des lassos. Cependant beaucoup de spécialistes de l' art rupestre ne le pensent pas. En effet on ne connaît pas d' exemple d' animaux qui après avoir été domestiqués soient redevenus sauvages.

Plusieurs éléments militent en faveur d' une expression plus mythographique que réaliste de cet art, notamment le fait que chaque espèce est en situation non écologique.

Il pourrait s' agir plutôt d' une relation symbolique entre l' homme et l' animal.      

 

 

 

Les nombreuses gravures de bovidés associés ou non aux girafes semble confirmer l' ambiance essentiellement bovidienne de Dabos. Des pasteurs faisant partie d' une d' une société à forte tradition d' élevage de bovins ont réalisé ces gravures.

Quelques figurations de la faune sauvage tels que éléphants ou rhinocéros font parties des gravures mais ne permettent pas d' être utilisées comme vecteur chronologique, cette faune ayant persisté longtemps en dépit de l' aridité grandissante.

Un personnage en attitude d'orant devant la grande girafe semble poser un problème de chronologie. En effet il est caractéristique de la période équidienne-caméline avec les figurations humaines bi-triangulaires. Il est d' ailleurs associé à des inscriptions libyques. Cependant le trait piqueté et serré de ce personnage contraste avec celui profondément incisé et poli des girafes. Même si on ne peut pas constater de superposition, ce personnage appartient certainement à une phase ultérieure de l' art rupestre de cette région.

Le site de Dabos est situé non loin de la route qui relie Agadez à Arlit et, depuis la reprise du tourisme dans le nord du Niger, est devenu un lieu touristique assez fréquenté. Beaucoup de visiteurs ne prennent pas de précaution et piétinent les gravures afin de mieux les photographier et celles ci qui sont assez fragiles et commencent à se détériorer.

Constatant ces risques le préhistorien français Jean Clottes entrepris de faire effectuer un moulage complet des girafes. L' opération financée par la Bradshaw Foundation et organisée par TARA (Trust for African Rock Art) s' est déroulée en 1999. Jean Clottes la relate dans son livre "Grandes girafes et fourmis vertes".

Le site de la fondation Bradshaw >>

Par ailleurs un gardien est à demeure sur le site. Il veille à ce que les véhicules ne s' approchent pas trop près, guide les visiteurs toujours par le même passage et veille à ce qu 'ils ne marchent pas sur les gravures.